L’impôt différé étant une nouvelle technique comptable introduite par le SCF, sa compréhension et son application par les opérateurs semblent soulever quelques difficultés.
La Commission a jugé nécessaire d’examiner ce thème afin de clarifier certains aspects de celui-ci et faciliter le traitement de quelques opérations qui génèrent des impôts différés actif ou passif.
En effet, il ne s’agit pas d’un traitement des impôts différés dans leur totalité, seules quelques opérations rencontrées couramment sont abordées, La Commission pourrait revenir ultérieurement sur le traitement d’autres opérations qui ne sont pas examinées dans le présent avis.
Parmi les opérations sujettes à l’impôt différé, on peut citer principalement les suivantes :
1- Les frais préliminaires inscrits en capitaux propres
2- L’écart de réévaluation ;
3- La discordance entre I ‘amortissement fiscal et I ‘amortissement comptable ;
4- Les provisions non déductibles jusqu’à réalisation de la perte de valeur ;
5- Les charges déductibles sous conditions ;
6- Les produits imposables sous conditions ;
7- Les contrats de location financement ;
8- Les produits, charges, gains et pertes inscrits en capitaux propres ;
9- L’actualisation des créances, dettes et comptes en devises ;
10- Les frais de développement ;
11-Les déficits fiscaux et crédits d’impôts;
12-Les biens de faible valeur unitaire admis fiscalement en charges ;
13- Le résultat de la consolidation ;
14- Les fusions, acquisitions et cession
Impôt différé
Définition
Les impôts différé sont une économie d’impôt (produit d’impôt) sur le résultat à réaliser ou une charge d’impôt sur le résultat à payer au cours des exercices futurs, iIs résultent de différences temporaires entre le résultat comptable, y compris le résultat des opérations portées directement en capitaux propres au cours de l’exercice et le résultat fiscal ainsi que par certaines opérations de bilan ou de gestion qui ouvrent droit soit à la récupération soit au paiement dans des conditions définies par la législation fiscale;
Objectif
Les impôts différés sont calculés et constatés pour permettre de ne faire supporter à l’exercice considéré que l’impôt sur le résultat de l’exercice qu’il devait supporter s’il n’y avait pas de distorsions temporaires entre le résultat comptable et le résultat fiscal.
Ils ne sont constatés, cependant, que dans la mesure où les résultats fiscaux prévisibles permettent leur récupération ou paiement
Champ d’application
L’application des impôts différés concerne toutes les entités économiques soumises au
paiement de l’impôt sur les bénéfices (IBS) que celles-ci supportent selon le régime du réel.
Les entités non soumises à I ‘impôt sur le bénéfice ou qui relèvent du régime fiscal du forfait ne sont donc pas concernée
Traitement comptable
1- Traitement des impôts différés relatifs aux amortissements
Le SCF définit I ‘amortissement comme étant la consommation des avantages économiques liés à un actif corporel ou incorporel qui doit être comptabilisé en charge à moins qu’il ne soit incorporé dans la valeur comptable d’un actif produit par l’entité pour elle-même.
A ce titre, le SCF prescrit à l’entité de choisir le mode d’amortissement le plus adapté pour refléter cette consommation d’avantages économiques et de fixer la durée d’utilité des biens exploités en fonction de sa stratégie de développement et de sa politique d’investissement.
Le mode d’amortissement et la durée d’utilité doivent être réexaminés périodiquement; les modifications éventuelles constituent des changements d’estimation sans retraitement rétrospectif.
En revanche, l’amortissement fiscal peut être différent de l’amortissement comptable, en fonction de la politique fiscale de l’Etat.
Cette divergence peut provenir soit de la base amortissable, soit du mode d’amortissement ou de la durée d’utilité.
Lorsque ces divergences sont temporelles ou temporaires, l’entité est tenue de constater un impôt différé actif ou un impôt différé passif. Dans le cas où ces divergences sont permanentes et définitives, aucun impôt différé n’est à constater;
Exemple n° 1 :
Supposons un équipement acquis en début d’année N avec les données ci-après :
- La valeur d’acquisition est de 3 000 000 DA
- La durée d’amortissement est de 5 ans
- Le mode d’amortissement comptable est linéaire
- Le mode d’amortissement fiscal est dégressif
- Le taux IBS : 19%
Pour faire ressortir l’impôt différé généré par l’application des deux modes d’amortissement, un tableau d’amortissement peut être présenté comme suit :
Nous observons qu’il faut constater, en fonction des écarts (6) figurant dans l’avant dernière colonne un impôt différé passif, les deux premières années et son ajustement se fera sur les 3 années suivantes ; Le compte impôt différé passif relatif à cette opération se trouverait ainsi soldé.
Comptablement, le compte 134 impôt différé passif sera crédité les deux premières années par le débit du compte 693 imposition différée actif, La constatation inverse se fera à partir de la troisième année.
Exemple n° 2 :
Prenons l’inverse du cas présenté ci-dessus.
Considérons que :
- Un Matériel informatique est acquis en début d’année à 6 000 000 DA ;
- L’amortissement fiscal pratiqué est le mode linéaire ;
- L’amortissement comptable retenu est le mode dégressif ;
- La durée d’amortissement est de 4 ans pour les deux modes d’amortissement.
- L’amortissement dégressif est choisi par l’entité, elle estime que c’est le mode le plus adapté pour refléter la consommation des avantages économiques.
- La dotation annuelle doit être évaluée selon ses propres estimations, en fonction de la valeur du marché, à la fin de chaque exercice ou en fonction des études technico-économiques.
Dans cet exemple, elle a opté pour la méthode appelée < Softy > ou somme des nombres d’années calculée selon la formulé [n x (n+1)/2, n étant la durée d’amortissement.
Établissons un tableau d’amortissement :
L’application de la méthode appelée < Softy > (Sum Of The Years)
- Somme des nombres d’années est dans ce cas de 10.
- Après avoir inversé les nombres de la colonne << Année >>, la dotation annuelle sera calculée en divisant le coût d’acquisition par la somme des nombres d’années (dix) soit 60 000 et on multiplie le nombre de l’année concernée par ce quotient.
Pour la première année, le quotient sera multiplié par 4, la deuxième année par 3 et ainsi de suite
- 1er année : (600.000/10) x 4 ;
- 2eme année : (600.000/10) x 3;
- Etc.
De ce tableau, il ressort qu’au cours des deux premières années, un impôt différé actif doit être constaté, puis réajusté à partir de la troisième année.
En fonction des montants figurant dans la colonne, pour les deux premières années, le compte 133 impôts différés actif est débité par le crédit du compte 692 imposition différé actif .
Pour les deux dernières années il y aura lieu de passer les écritures inverses.
A la fin de la quatrième année, le compte 133 impôts différés actif relatif à cette opération se trouvera soldé.
Exemple n° 3 :
Ce cas fait apparaître un écart d’amortissement entre l’amortissement comptable et l’amortissement fiscal, mais l’écart étant permanent et définitif, il ne donne pas lieu à la
constatation d’un impôt différé.
Supposons :
- Une acquisition d’un véhicule touristique d’une valeur de 2 500 000 DA ;
- La valeur fiscale amortissable est de 1 000 000 :
- La durée d’amortissement est fixée à 5 ans ;
- Le mode d’amortissement linéaire est retenu sur le plan comptable et fiscal
Sur la base de ces données :
– Dotation aux amortissements comptable annuelle est de 500 000 DA ;
– Dotation aux amortissements fiscale annuelle est de 200 000 DA ;
L’écart annuel entre les deux amortissements est de 300 000 DA.
Cette différence étant permanente et définitive, elle ne donne lieu à aucune constatation
d’impôt différé.
2- Traitement des opérations inscrites dans les capitaux propres notamment dans le compte 11 report à nouveau
Les charges et produits inscrits en capitaux propres, en particulier dans le compte 11x report à nouveau sont soumises au même traitement que les charges et produits (gains et pertes) inscrits en compte de gestion en ce qui concerne I’impôt sur le résultat.
L’impôt généré ou l’économie d’impôt générée par ces opérations donnent lieu en principe à des corrections de l’IBS inscrit dans le compte 695 impôts sur les bénéfices basés sur les résultats des activités ordinaires par le biais des comptes impôts différés appropriés.
En définitif, le résultat de ces opérations doit apparaître en net dans les capitaux propres, déduction faite de l’IBS ou de l’économie d’IBS correspondant;
L’examen de quelques exemples chiffrés d’opérations, jugées significatives par l’entité, inscrites dans le compte 11x report à nouveau, comme les opérations suivantes constatées au cours de l’exercice N :
- Produit imposable de l’exercice : 1O MDA
- Dividendes reçus des filiales non imposables : 5 MDA
- Charges de prestations reçues de N-1: 8 MDA
- Pénalités fiscales : 2 MDA
- Frais de siège non encore payés : 4 MDA
Tous ces produits et charges sont relatifs aux exercices antérieurs.
Du point de vue de l’impôt différé, on observe que:
- Certaines opérations donnent lieu à un impôt différé,
- D’autres conduisent à une correction de l’IBS inscrit dans le compte 695 impôt sur les bénéfices,
- Tandis que certaine sont neutres et ne génèrent aucune différence temporel,
A/ Opérations générant un impôt différé :
Les frais de Siège ne sont déductibles que lors de leur paiement ; ils génèrent donc un impôt
différé : 133 impôts différés Actif | 11x Report à nouveau
4 MDA X 19% = 0,76 MDA
B/ Opérations nécessitant une correction de l’impôt inscrit dans le compte 695 impôts sur les bénéfices basé sur le résultat des activités ordinaire
Les produits imposables et les charges déductibles donnent lieu à une correction d’IBS 695 impôts sur les bénéfices basés sur le résultat des activités ordinaires en contrepartie du compte 11x Report à nouveau.
(10 – 8) x 19% = 0,38 MDA.
Les écritures relatives aux charges et produits seront constatées soit opération par opération soit globalement avec des calculs réalisés en extracomptable.
C/ Opérations neutres
Les dividendes reçus des filiales n’étant pas imposables et les pénalités non déductibles, il n’y a aucun impôt différé ou correction d’impôt à constater.
3- Autres opérations générant des différences temporaires
Dans le cas présenté supposons les données, ci- après :
- Les montants sont exprimés en millions de dinars.
- Pour les années antérieures à N, il n’a pas été constaté d’impôts différés en dehors de ceux relatifs aux déficits fiscaux antérieur
(a) Déductions permanentes ne générant aucune différence temporaire.
(b) Par hypothèse, considéré dans l’exemple réintégrable ou déductible lors de leur réalisation.
A/ Calcul de l’impôt différé Pour N:
Dans l’exemple considéré, certaines opérations ne sont pas déductibles.
Elles sont réintégrées au résultat fiscal de manière définitive et constituent des différences permanentes. Elles ne donneront jamais lieu à des impôts différés.
Par contre, d’autres opérations sont génératrices de différences temporelles ou temporaires du
fait du décalage entre leur constatation comptable et leur prise en compte fiscale.
Afin de gommer ces distorsions entre les valeurs comptables et les valeurs fiscales, il y a lieu de constater au plus tard à la clôture de l’exercice un impôt différé. Ce dernier est actif si cette différence est déductible dans l'(ou les) exercice(s) suivant(s) et passif au cas où cette différence est imposable dans le futur.
Pour l’année N: l’impôt différé à constater est égal au total des différences temporaires auquel
est appliqué le taux d’imposition à 25%, soit :
B/ Calcul de l’impôt différé pour N+I
Pour l’année N+1, il y’a lieu de procéder de la même façon :
Les écritures relatives à l’impôt différé seront constatées soit opération par opération soit globalement avec des calculs réalisés en extracomptable.
Dans tous les cas, l’entité doit justifier les soldes relatifs aux comptes des impôts différés (les comptes 133 et 134) et fournir les informations y relatives dans l’annexe des états financiers.
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